Page 8 - Le Livre des Esprits - 1ere Edition -1857
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12 INTRODUCTION
ce qui vit aurait une âme, les plantes aussi bien que les animaux et
l’homme.
D’autres pensent que l’âme est le principe de l’intelligence ; agent
universel dont chaque être absorbe une portion. Selon eux, il n’y aurait
pour tout l’univers qu’une seule âme qui distribue des étincelles entre
les divers êtres intelligents pendant leur vie ; après la mort chaque
étincelle retourne à la source commune où elle se confond dans le
tout, comme les ruisseaux et les fleuves retournent à la mer d'où ils
sont sortis. Cette opinion diffère de la précédente, en ce que, dans cette
hypothèse, il y a en nous plus que la matière, et qu’il reste quelque
chose après la mort ; mais c’est à peu près comme s’il ne restait rien,
puisque n’ayant plus d'individualité nous n’aurions plus conscience
de nous-mêmes. Dans cette opinion l’âme universelle serait Dieu, et
chaque être une portion de la divinité ; c’est la doctrine du panthéisme.
Selon d’autres enfin, l’âme est un être moral, distinct, indépendant
de la matière et qui conserve son individualité après la mort. Cette
acception est sans contredit la plus générale, parce que, sous un nom
ou sous un autre, l’idée de cet être qui survit au corps, se trouve à l’état
de croyance instinctive et indépendante de tout enseignement chez les
peuples, quel que soit le degré de leur civilisation. Cette doctrine est
celle des spiritualistes.
Sans discuter ici le mérite de ces opinions, et nous plaçant pour un
moment sur un terrain neutre, nous dirons que ces trois applications
du mot âme constituent trois idées distinctes qui demanderaient
chacune un terme différent. Ce mot a donc une triple acception, et
chacun a raison à son point de vue dans la définition qu’il en donne ;
le tort est à la langue de n’avoir qu’un mot pour trois idées. Pour éviter
toute équivoque, il faudrait restreindre l'acception du mot âme à l’une
des trois choses que nous avons définies ; le choix est indifférent, le
tout est de s’entendre, c’est une affaire de convention. Nous croyons
plus logique de le prendre dans son acception la plus vulgaire ; c’est
pourquoi nous appelons ÂME, l’être immatériel et individuel qui réside en
nous et qui survit au corps.
A défaut d’un mot spécial pour chacun des deux autres points, nous
appelons :
Principe vital le principe de la vie matérielle et organique, quelle qu’en
soit la source, et qui est commun à tous les êtres vivants, depuis les
plantes jusqu’à l’homme. La vie pouvant exister abstraction faite